Présentation géo-sociopolitique et éducative
Dans la région de Thrace au nord de la Grèce, se trouve une minorité musulmane officiellement reconnue par l'État grec, composée de Tsiganes, de Turcs (i.e., Grecs turcophones, en tant que terme utilisé plus fréquemment dans la bibliographie) et de Pomaques, population qui réside essentiellement dans le massif des Rhodopes, locuteurs du pomaque (bulgare dialectal de tradition orale). Il s’agit d’une catégorie de population inconnue jusqu'à récemment de la majorité des Grecs (Markou, 2002, p. 46), car ses caractéristiques identitaires sont mal connues.
Historiquement parlant, cette minorité musulmane a acquis des droits spécifiques et est liée au Traité de Lausanne de 1923. Ce traité instaure, entre autres, des échanges forcés de populations entre la Grèce et la Turquie sur la base de la religion (Cf. articles 37 à 45) (Histoire de la Nation grecque, 1978, p. 260-271). Le traité prévoyait quelques exceptions concernant ces déplacements : les minorités grecques orthodoxes d’Istanbul, des îles d'Imbros et de Tenedos étaient autorisées à rester, ainsi que la minorité musulmane de Thrace occidentale.
Par ailleurs, ce traité a défini une éducation spécifique à ces minorités, structurée selon des critères religieux : des écoles appelées minoritaires ou musulmanes sont ainsi mises en place. Nous nous concentrons sur deux populations de ce groupe minoritaire : les turcophones qui en représentent la moitié et les Pomaques qui en représentent 30% (Sella-Mazi, 2015, p. 36) Cette minorité choisit plutôt pour ses enfants une éducation scolaire dans les établissements dédiés (en primaire et/ou au secondaire), afin de suivre un programme éducatif partagé (Αskouni, 2006, p. 61- 79) entre les deux langues, le grec et le turc, et pour apprendre davantage de langues étrangères. Le turc est considéré comme la langue maternelle de tous les enfants musulmans, même si cela n’est pas toujours le cas. Dans le cas des musulmans pomaques, la langue maternelle est le pomaque, un dialecte bulgare, différent du grec ou du turc. Parfois, il est très difficile, même pour les locuteurs de cette minorité, de définir avec exactitude leur langue maternelle. Comme le souligne Markou (Markou, 2002), le mélange de langues (code mixing)[1] dans leurs conversations, a pour résultat une langue ‘hybride’, avec une alternance de codes (code switching)[2]. Cette langue ‘hybride’ emploie des éléments de plusieurs langues parlées comme le grec, le turc et le pomaque ; elle est rencontrée très fréquemment tant dans le cadre familial que dans le cadre public (vie de tous les jours). Que ce soient des conversations en turc ou en pomaque, on y retrouve des insertions de segments en grec (Markou, 2002, p. 48).
En ce qui concerne l’éducation de cette minorité, celle-ci s’est beaucoup améliorée ces dernières années grâce aux différents projets pédagogiques et éducatifs et aux réformes ayant comme but l’amélioration de l’éducation. Sont pris en compte ses particularités et ses besoins, afin d’augmenter le pourcentage de scolarisation, de supprimer les inégalités, de réduire les stéréotypes et les discriminations dont fait souvent l’objet cette population minoritaire. Dragonas et Frangoudaki (Dragonas & Frangoudaki, 2008, p. 17-56) analysent et mettent en lumière le changement du regard politique de l’État grec sur les Pomaques depuis 1990 et les réformes éducatives en 1995 et 1996 concernant l’immigration, l’émigration et les minorités en général, plus particulièrement la minorité de Thrace. Ces chercheuses présentent différents aspects de ce changement concernant entre autres les projets mis en place comme le ‘PEM’[3], les manuels scolaires et les outils pédagogiques et éducatifs, la formation des enseignants, les nouvelles structures créées, etc. Les résultats de ces projets et des réformes ont rapidement porté leurs fruits. En effet, sur une période de dix ans, l’accès de cette minorité à l’éducation secondaire a été multiplié par quatre et la scolarisation des femmes a très rapidement augmenté. Les approches sur l’enseignement des matières ont aussi été modifiées. Par exemple, en ce qui concerne l’enseignement et le renforcement de la langue grecque chez cette population, Iordanidou (Iordanidou, 2008, p.177-186) souligne et explique les objectifs, les outils et leur application, ainsi que l’approche didactique pour cette matière considérée comme L2 en primaire et au secondaire. De plus, ce qui est évident, c’est qu’à partir du moment où l’État grec a pris soin de s’occuper de cette minorité et de son éducation, depuis la moitié des années 90, parallèlement aux changements socioculturels et aux projets mis en place (par exemple ‘PEM’), la fuite d’élèves[4] venant de cette minorité a visiblement diminué. Les élèves poursuivent et accomplissent non seulement l’éducation obligatoire de neuf ans, mais vont aussi au-delà, ouvrant ainsi la voie vers une éducation supérieure (Askouni, 2008, p. 123-137).
L’intérêt de notre recherche
Dans le cadre de nos travaux sur cette population minoritaire, nous nous centrons sur l’étude de la représentation langagière qui sous-tend le traitement de la morphologie, plus précisément le traitement des mots morphologiquement complexes du grec. Notre étude se distingue du point de vue de la population choisie, autrement dit, nous examinons une population, celle des Pomaques et des turcophones de cette minorité, rarement étudiée du point de vue de ses compétences en matière de lexique, en particulier au travers de mesures expérimentales.
Nous suivons l’approche selon laquelle les unités lexicales (UL) qui correspondent aux mots construits possèdent deux dimensions : syntagmatique, provenant de leur structure interne et paradigmatique, issue des relations sémantico-formelles qui s’établissent entre les mots du lexique (cf. Corbin, 1987/1991 ; Aronoff, 1994, 2007 ; Aronoff & Fuderman, 2005). Concernant le traitement morphologique (processing) des mots construits, nous optons pour une approche de type bottom-up selon laquelle les mots sont perçus de façon holistique et au travers de leur dimension paradigmatique (e.g., Voga & Giraudo 2017). Ceci s’oppose à une approche décompositionnelle qui postule que l’accès aux représentations lexicales des mots complexes s’opère uniquement sur la base de l’activation du radical, induisant ainsi un mécanisme systématique de décomposition en morphèmes pour séparer cet élément de l’affixe (e.g., Rastle et al., 2004). Plusieurs travaux en traitement morphologique ont démontré que des facteurs linguistiques (e.g., la saillance : Giraudo & Dal Maso 2016a, b ; la productivité : Plag, 2003) et cognitifs (e.g., la fréquence : Voga & Giraudo 2009 ; la taille de la famille morphologique : Voga & Giraudo, 2017 ; Voga & Anastassiadis-Syméonidis, 2018) influencent significativement l’accès au lexique, aussi bien en L1 qu’en L2.
Toutefois la plupart de ces recherches se fonde sur des données recueillies auprès d’une population au parcours éducatif typique, d’étudiants à l’université en majorité de sexe féminin appartenant à des filières comme les lettres ou la psychologie. Notre recherche a pour objectif d’étudier la représentation langagière d’un public au profil langagier ‘atypique’, celui de la minorité de Thrace, que nous avons décrite plus haut. Pour ce faire, nous nous inspirons d’études précédentes qui ont été menées sur le grec L1 et L2 (e.g., Voga, Nikolaou & Anastassiadis-Syméonidis 2018 ; Voga & Anastassiadis-Syméonidis, 2017).
Hypothèses de recherche
Nous accepterons que les unités lexicales ne soient pas toutes traitées de la même façon au niveau morphologique et que leur traitement peut varier en fonction de certaines caractéristiques. L’étude a pour objectif dans un premier temps d'examiner le rôle de certaines variables, c'est-à-dire le rôle de certaines caractéristiques qui sont contrôlées dans notre expérience (i.e. type de suffixe et type d’amorce[5]). L’un de nos objectifs consiste à effectuer une comparaison entre deux types de connexions morphologiques : celle qu’il y aurait entre le suffixe -ιστής /-i'stis/ ‘-iste’ et le suffixe -ισμός /-i΄zmos/ ‘-isme’ (e.g. εξτρεμιστής /ekstremi΄stis/ ‘extrémiste’ – εξτρεμισμός /ekstremi΄zmos/ ‘extrémisme’), d’une part, et d'autre part celle qu’il y aurait entre le suffixé en -ικός /i΄kοs/ ‘-ique’ et les mots de la même famille, c’est-à-dire qui sont construits avec la même base (e.g. χάος /΄xaos/ ‘chaos’ – χαοτικός /xaoti΄kos/ ‘chaotique’ ou ηρωισμός /iroi΄zmos/‘héroïsme’ – ηρωικός /iroi΄kos/ ‘héroïque’). Nous pouvons faire l'hypothèse que le suffixe -ικός /i΄kοs/ ‘-ique’ (e.g. χαρακτηριστικός /haraktiristi΄kοs/ ‘caractéristique’) du fait de sa fréquence élevée, sera plus saillant que le suffixe -ιστής /-i'stis/ ‘-iste’. Dans ce cas, nous pouvons nous attendre à des effets morphologiques plus importants pour la condition du suffixe -ικός /i΄kοs/ ‘-ique’ que pour la condition du suffixe -ιστής /-i'stis/ ‘-iste. En même temps, la relation étroite entre le suffixe -ιστής /-i'stis/ ‘-iste’ et -ισμός /-i΄zmos/ ‘-isme’ (e.g. σοσιαλιστής /sosiali΄stis/ ‘socialiste’ –σοσιαλισμός /sosiali΄zmos/ ‘socialisme’) devrait aussi donner lieu à des effets significatifs d’amorçage morphologique. Il faut néanmoins observer que les suffixes -ιστής /-i'stis/ ‘-iste’et -ισμός /-izmos/ ‘-isme’ se trouvent dans des mots plus savants, avec une base qui correspond à une unité lexicale plus abstraite au niveau sémantique. Ils devraient donc induire des effets, grâce à la connexion directe qu’il existe entre -ιστής /-i'stis/ ‘-iste’ et -ισμός /-i΄zmos/ ‘-isme’, mais il est tout à fait possible que ces effets soient d’amplitude moins grande que les effets induits par le suffixe -ικός /i΄kοs/ ‘-ique’.
Pour répondre à ces questions, nous allons examiner les effets d’amorçage masqué que nous obtenons pour chaque type de mot et pour chaque condition. Les sections qui suivent présentent cette expérience : la méthodologie suivie, les stimuli employés, ainsi que le protocole expérimental. L’expérience a été menée entre 20/06/20 et 04/09/20 sur le terrain, c'est-à-dire dans la ville de Xanthi et les villages autour, dans la région de Thrace en Grèce, d’où l’auteur de ces lignes est originaire.
Procédure
Pour tester nos hypothèses de manière expérimentale, nous avons utilisé le paradigme d'amorçage masqué (masked priming, Forster & Forster, 2003) associé à la tâche décision lexicale (TDL), un protocole de chronométrie mentale fréquemment utilisé pour étudier l’accès au lexique et les relations entre les représentations lexicales (cf. Kinoshita & Lupker, 2003 pour un état de l’art). La TDL consiste à demander aux participants de décider le plus spontanément possible si « OUI » l’item qui leur est présenté sur l’écran est un mot ou « NON, ce n'est pas un mot » en appuyant sur des touches spécifiques du clavier d'ordinateur. L’amorçage masqué consiste en la présentation d’une ligne de dièses (servant de « masque ») suivie par l’apparition d’un premier mot « amorce », affiché pour une durée si brève (< 60 millisecondes) qu’il n'est pas perçu de manière consciente par le sujet. Ce mot amorce est remplacé par un second mot[6], le mot « cible »sur lequel le participant opère sa décision lexicale. Cette tâche de décision lexicale signifie que le participant décide si le stimulus qu’il voit sur l’écran d’ordinateur est un mot ou pas. Ces temps de réponse (TR), liés à la décision lexicale que nous demandons au participant-sujet d’effectuer, reflètent le traitement du mot de sa part et nous renseignent sur les processus et les mécanismes mentaux qui le conduisent à émettre sa réponse. Ces TR font par la suite l’objet d’une analyse statistique détaillée.
L'amorce reste sur l'écran pour une durée déterminée de quelques millisecondes, fait qui permet son traitement par le système langagier, mais pas son identification consciente. Cette technique d’amorçage « subliminal » est utilisée afin d'éviter la mise en place de stratégies de décision basées sur le repérage par le participant des liens manipulés entre le mot amorce et sa cible. Les données de littérature indiquent qu’avec une durée d'amorçage (SOA, i.e., Stimulus-Onset Asynchrony) autour de 48 ms, des effets d'amorçage morphologiques positifs sont observés. Ces effets témoignent d’un transfert d’activation positive entre le mot amorce et le mot cible reliés morphologiquement. Ce transfert est rendu possible grâce à l’existence de représentations partagées. Autrement dit, les effets d’amorçage masqué, lorsqu’ils sont trouvés, sont interprétés comme la preuve du fait que les mots sont interconnectés dans le lexique mental, grâce à leurs relations, en l’occurrence, dans notre expérience, grâce à leur relation morphologique, par ex. celle entre la base et le dérivé (e.g., χάος /΄xaos/ ‘chaos’ – χαοτικός /xaoti΄kos/), ou bien entre les dérivés eux-mêmes (e.g., σοσιαλιστής /sosiali΄stis/ ‘socialiste’ – σοσιαλισμός /sosiali΄zmos/ ‘socialisme’).
Les mesures comportementales constituent le principal moyen d’étudier les représentations mentales chez le locuteur en langue première mais aussi seconde/étrangère (L1/L2) en interaction avec leur niveau de maîtrise langagière, (i.e., du plus faible au plus élevé). Dans le cadre de notre expérience, nous avons examiné les trois types de conditions d'amorçage (cf. table 1 pour les conditions et les caractéristiques des stimuli) : la condition d’identité (ou répétition), (e.g., σοσιαλιστής /sosiali΄stis/ ‘socialiste’ – σοσιαλιστής /sosiali΄stis/ ‘socialiste’) ; la condition morphologique, (e.g., σοσιαλιστής /sosiali΄stis/ ‘socialiste’ - σοσιαλισμός /sosiali΄zmos/ ‘socialisme’) ; enfin, la condition non-reliée, (e.g., αμφιβολία /amfivo΄lia/ ‘doute’- σοσιαλιστής /sosiali΄stis/ ‘socialiste’). Dans ce type de mesure, la variable dépendante (VD) est le temps de réponse/réaction et les erreurs que feront les participants, erreurs qui font aussi l’objet d’une analyse statistique. Cela signifie que ces variables dépendent du participant (sujet) et de sa performance, et que l’expérimentateur ne peut donc pas les contrôler.
Matériel linguistique
216 stimuli en grec (81 mots suffixés, 27 items de remplissage - mots, 81 non-mots et 27 items de remplissage non-mots) ont été sélectionnés pour notre étude. Les mots suffixés relèvent 3 types de mots complexes en grec :
1) des mots suffixés en -ιστής /-i'stis/ '-iste' avec 0-base en grec (e.g., ακτιβιστής /aktivi΄stis/ ‘activiste’), c’est-à-dire des mots dont la base n’existe pas en grec. Même si les suffixés en -ιστής /-i'stis/ '-iste' et en -ισμός /-izmos/ ‘-isme’ existent et sont parfaitement intégrés dans la langue grecque, la base, par ex. ακτιβ- /aktiv-/ ‘activ-’ n’existe pas et ne signifie absolument rien toute seule. Dans ce type de mots, nous pouvons reconnaître le suffixe -ιστής /i΄stis/ '-iste' mais aussi les fait qu’il existe d’autres unités lexicales de la même série morphologique, par ex. avec une base grecque (e.g., επεκτατισμός /epektati΄zmos/ ‘expansionisme’), ou bien, avec une base étrangère (non-grecque) (e.g., αλτερμοντιαλισμός /altermondiali΄zmos/ ‘altremondialisme’ etc.). La base de cette catégorie de mots correspond donc à une origine étrangère qui n’a pas été importée en grec. C’est pour cela que nous appelons cette catégorie « 0-base ». La base dans cette catégorie de mots ne correspond à aucune entrée lexicale en grec, mais correspond à une base qui existe en anglais ou en français.
2) des mots suffixés en -ιστής /i'stis/ ‘-iste’ construits avec une base grecque (e.g., εθνικιστής /eθniki'stis/'nationaliste'), c’est-à-dire qui possède un sens et une existence propres en tant que lexème (e.g., έθνος /΄eθnos/ ‘nation’).
3) des mots suffixés en -ικός /i΄kοs/ '-ique’, construits avec une base grecque (e.g., αλλεργικός /alerji'kos/ ‘allergique’) comme le radical αλλεργ-/alerj-/ ‘allerg-’ qui donne αλλεργία /aler΄jia/ ‘allergie’.
Le tableau suivant (tableau 1.) résume les stimuli de cette expérience :
Conditions |
|||
Types de Stimuli - Cibles |
Types d’Amorce |
||
MOTS |
Identité (Id.) -réception |
Morphologique (M)- (Test) |
Non-Reliée (U) |
a. 0-base grecque -ιστής /i'stis/ ‘-iste’ e.x., ακτιβιστής/aktivi΄stis/'activiiste' |
ακτιβιστής/aktivi΄stis/'activiiste' |
ακτιβισμός/aktivi΄zmoς/'activisme' |
επιφάνεια /epi΄fania/'surface' |
b. base grecque -ιστής /i'stis/ ‘-iste’ e.x., εθνικιστής/eθniki΄stis/'nationaliste' |
εθνικιστής/eθniki΄stis/'nationaliste' |
εθνικισμός/eθniki΄zmos/'nationalisme' |
αμφιθεατρικός/amfiθeatri΄kos/ 'en amphithéatre' |
c. base grecque -ικός /i΄kοs/ '-ique' e.x., αλλεργικός/alerji΄kos/ 'allergique' |
αλλεργικός/alerji΄kos/ 'allergique' |
αλλεργία /alerj΄ia/ 'allergie' |
διαθέσιμος/dia΄θesimos/ 'disponible' |
Tableau 1: Conditions expérimentales et exemples de mots utilisés dans notre expérience d’amorçage masqué : trois types de stimuli (0-base grecque en -iste, base grecque en -iste, base grecque en -ique) et trois types d’amorce (identité, morphologique et non reliée).
L’expérience proposée à la minorité linguistique est une réplication de celle menée par Voga et Anastassiadis-Syméonidis (2017), avec la même méthodologie et les mêmes stimuli à quelques modifications près (par exemple quelques items en moins). Ici, toutes les amorces et toutes les cibles sont en grec. Les éléments lexicaux choisis comme stimuli (mots) pour l’expérience, constituent des termes d’un langage soutenu, (+ savant) (e.g., πλουραλιστής /plurali΄stis/ ‘pluraliste’, ατομικιστής /atomiki΄stis/ ‘individualiste’, μοναρχικός /monarxi΄kos/ ‘monarchique’) qui ne sont pas des mots d’une très grande fréquence. Le tableau ci-dessous (Tableau 2.) présente à titre indicatif où se trouve la fréquence lexicale des 6 mots donnés comme exemple de matériel, calculée par million d’occurrences de mots répertoriés dans la base lexicale Lexique 3.83[7].
Lemmes |
Fréquences par million d’occurrences (freqlemlivres) issues de Lexique 3.83 |
Maison |
575.34 |
Maisonnette |
7.97 |
Activiste |
0.54 |
Pluraliste |
0.14 |
Nationaliste |
1.55 |
Allergique |
0.74 |
Tableau 2: Tableau des fréquences (Fréquence par million d’occurrences) indiquées dans Lexique 3.83. Les exemples choisis renvoient à un mot de forme simple de registre ‘langue courante’ (maison) et cinq mots morphologiquement complexes de différents suffixes (-ette (- savant), -iste, -ique (+ savant)).
Participants
Comme nous l’avons énoncé dans notre introduction, la variable locuteur n’est pas souvent prise en compte dans ce type d’expériences. Le profil du locuteur et ses caractéristiques, comme son parcours éducatif, peuvent toutefois constituer des facteurs importants pour le traitement langagier ; l’usage du langage ne peut en effet être considéré comme le même et équivalent pour tous les locuteurs. Il y a des différences de parcours institutionnel, de taille du vocabulaire et d'exposition à l’écrit chez chaque individu ; des différences liées à l'exposition à la langue d'origine, à la ou les L1 langue.s maternelle.s, et à sa ou leur pratique ; la même chose est vraie pour la/les L2 et/ou la/les langues de l’école, et tout cela constitue des facteurs qui devraient être pris en compte. Dans le cas de la minorité qui nous intéresse ici, son exposition au grec peut être moindre par rapport au locuteur grec standard, de type étudiant à l’université. On pourrait donc faire l’hypothèse que cette population montrera un pattern de résultats différent de celui que l’on trouve habituellement chez la population des grecs des grandes villes, avec lesquels la plupart des expériences ont été menées. L’objectif de notre étude est donc de répondre à cette question.
Nous avons élaboré un questionnaire biographique qui nous a permis d'avoir des informations sur le profil sociolinguistique de chaque sujet (âge, L1, L2, niveau et lieu de scolarité, etc.) et par conséquent sur le profil global du groupe. L’expérience a été réalisée à Xanthi, ville de la région de Thrace en Grèce, avec 34 participants volontaires dont 11 hommes et 23 femmes (âge moyen du groupe : 27 ans). Les participants sont tous plurilingues avec comme L1 le pomaque et/ou le turc, et le grec parmi leurs L2. La plupart d’entre eux sont salariés, avec un parcours éducatif de haut niveau dans des universités grecques. 29 des 34 participants ont eu une scolarité primaire principalement en turc dans des écoles appelées « minoritaires », puis en grec, ce qui représente une scolarité atypique du point de vue linguistique. De ce fait, tous ces éléments démontrent la richesse du patrimoine langagier de cette région.
Prenons à titre d’exemple les profils suivants : un homme, A.K., 26 ans, dont la L1 est le pomaque ; il a eu une scolarité primaire à dominante turque, puis par la suite grecque (collège, lycée, Université). Sur le questionnaire, A.K. déclare que le grec est sa L2, et que le turc (niveau B2) est également sa L2, ainsi que l’anglais (niveau B2). Ou encore une femme B.T., 33 ans, dont la L1 est le turc ; elle a une scolarité primaire à dominante turque, puis grecque, université comprise. Elle a déclaré sur le questionnaire distribué, le grec comme L2 et elle parle aussi l’anglais, qui est aussi pour elle une L2.
Premiers Résultats
L'étude se base sur le recueil de données comportementales (i.e., réponses et temps de réponse), portant sur le traitement langagier de mots morphologiquement complexes. En ce qui concerne les résultats définitifs, c’est-à-dire savoir s’il y a des effets significatifs pour les facteurs principaux, nous ne pourrons en parler qu’après une analyse statistique complète (ANOVA). Cette analyse statistique n’étant pas encore complète, nous tenterons de décrire, à travers une analyse descriptive donnant un premier aperçu, les grandes tendances de nos résultats.
Quelques items 'problématiques' ont dû être éliminés de notre analyse en raison d’un trop grand pourcentage d'erreurs de classification (i.e., > à 50% d’erreurs) (e.g., αλπινιστής /alpini΄stis/ ‘alpiniste’ ou αλτερμοντιαλιστής /altermondiali΄stis/ ‘altermondialiste’). Pour ces items 'spéciaux', la majorité des participants ne semble pas les connaître puisqu’ils les ont classés comme étant des pseudo-mots, alors qu’ils existent réellement. Sur les items que nous avons conservés, nous constatons que les mots suffixés en -ιστής /-istis/ ‘-iste’ avec une 0-base (e.g., ακτιβιστής /aktivi΄stis/ 'activiste', οπτιμιστής /optimi΄stίs/ 'optimiste') montrent un grand nombre d’erreurs et des TR moyens plus élevés en comparaison avec les autres types de mots : 1122ms en moyenne, versus 1075ms en moyenne pour la 2ème catégorie et 980ms pour les suffixés en -ικός /i΄kοs/ ‘-ique’. Cela peut s’expliquer par le fait que les mots de cette catégorie appartiennent au langage soutenu et ne sont donc pas très fréquents. De plus, ils ne possèdent pas de famille morphologique à proprement parler en grec, puisque leur base n’existe pas seule.
Le fait que les TR sont plus courts (toutes conditions confondues) pour les suffixés en ικός /-i΄kοs/ '-ique' est lié à la présence du suffixe productif ικός /-i΄kοs/ '-ique', avec dans le cas précis de notre condition, une base provenant d’un mot existant en grec, c’est-à-dire correspondant à une entrée lexicale (e.g., μαγικός /maji΄kos/ 'magique'). En regardant les premiers résultats arithmétiques, nous pouvons dire qu’il y a de grandes chances d’avoir des effets significatifs, en particulier dans les conditions a. (0-base grecque en -ιστής /i'stis/ ‘-iste’) et c. (base grecque en -ικός /i΄kοs/ '-ique'). Dans ces conditions, il y a des effets d’identité (i.e., de répétition) pour les mots en -ιστής /-i'stis/ '-iste' avec 0-base en grec (e.g., ρεαλιστής /reali΄stis/ ‘réaliste’) et les mots en -ικός /i΄kοs/ '-ique’ avec une base grecque (e.g., μοναρχικός /monarxi΄kos/ ‘monarchique’). Ces effets sont de l’ordre de 40ms pour les premiers, et de 20ms pour les seconds, et vue la distribution de nos TD, ils ont de fortes chances d’être significatifs. Si cela était validé par l’analyse statistique, ce serait la preuve que le protocole a bien marché et que nos participants ont bien traité l’amorce présentée pour une durée très limitée (SOA de 48ms). En effet, le fait que nos participants ont pu lire et traiter les mots suffixés qu’étaient les amorces (des conditions a. et c.) et le fait que ceci conduise à des effets d’identité, signifie que nos participants ont bien activé l’entrée lexicale correspondante. La langue qui est ici concernée est bien la langue grecque, puisque les amorces et les cibles sont en grec. Même si les participants ne considèrent pas le grec comme leur L1 (comme indiqué dans leur parcours biographique et familial), nos résultats montrent que pour ce qui est de la perception du langage écrit, le grec correspond bien à leur L1.
De surcroit, il y a de fortes chances qu’il y ait un effet morphologique significatif pour les mots en -ιστής /-i'stis/ '-iste' avec 0-base, (e.g., ρεαλιστής /reali΄stis/ ‘réaliste’), effet de l’ordre de 50ms, de même, pour les suffixés en -ικός /i΄kοs/ '-ique’ (e.g., μοναρχικός /monarxi΄kos/ ‘monarchique’), cet effet est de l’ordre de 20ms, ce qui correspond à un effet morphologique standard. Cet effet indique que le locuteur passe par la relation morphologique entre μελαγχολία /melaŋxo΄lia/ ‘mélancolie’ et μελαγχολικός /melaŋxoli΄kos/ ‘mélancolique’ afin de reconnaitre ce dernier, qui est présenté comme cible de la reconnaissance. Cela indique aussi que nos participants ont traité l’amorce morphologiquement complexe et grâce à la connexion qui existe au sein du lexique mental entre les deux mots morphologiquement liés, ils ont pu reconnaître plus rapidement la cible. Quoi qu’il en soit, les suffixés en -ικός /i΄kοs/ '-ique’ sont reconnus plus rapidement par rapport au suffixés en -ιστής /-i'stis/ '-iste', et cela reflète sans doute le fait que le suffixe -ικός /i΄kοs/ '-ique’ est bien plus fréquent, et de ce fait saillant, que le suffixe -ιστής /-i'stis/ '-iste'. Mais cela ne saurait signifier que les suffixés en -ιστής /-i'stis/ '-iste' n’ont pas produit d’effet, bien au contraire, si l’on se base sur l’analyse descriptive. Si ce résultat était vérifié, cela serait à interpréter comme une influence des L2 de nos participants, L2 autres que le grec ; comme mentionné plus haut, nos participants maitrisent des langues étrangères comme l’anglais, et c’est probablement par l’intermédiaire de ces L2 qu’ils parviennent à directement activer les représentations lexicales des mots dont la base n’existe pas en grec. Leur profil plurilingue les rend aptes à reconnaitre immédiatement les mots provenant de l’anglais ou du français (mots à 0-base grecque).
Discussion
En accord avec la théorie constructionnelle de la morphologie (e.g., Corbin 1987/ 1991 ; Boiij, 2010) nous posons que les relations morphologiques entre les mots du lexique et par extension leur acquisition, s’effectue au travers des liens sémantico-formels systématiques qu’ils entretiennent. Ainsi, les mots seraient interconnectés au travers de leurs relations syntagmatiques (i.e., liens associatifs établis sur la base de ressemblances de surface : morphèmes, formants ou autres segments comme -ιστής/-i΄stis/ ‘-iste’, -ισμός /-i΄smos/ ‘-isme’) et paradigmatiques (i.e., liens interfaciels issus de partage de traits sémantico-formels comme pour les mots αλλεργικός /alerji΄kos/ ‘allergique’ – αλλεργία / aler΄jia/ ‘allergie’). Ces connections potentiellement présentes dans le système langagier du locuteur seraient néanmoins variables selon leur expérience linguistique. Par exemple, pour un participant qui a été peu exposé à la langue écrite, l’effet morphologique pourrait être très faible (force de connexion faible) voire inexistant (absence de connexion) en raison d’une trop faible exposition à l’input. Ce n’est pas du tout ce que l’on observe dans nos résultats, qui témoignent d’un fonctionnement plus proche de celui que l’on peut observer avec des participants qui sont étudiants à l’université grecque. La seule condition qui pourrait se différencier est la condition b. (i.e., base grecque -ιστής /i'stis/ ‘-iste’) , pour laquelle l’analyse statistique est nécessaire, étant donné que arithmétiquement, nous avons trouvé des effets négatifs de l’ordre de 20ms, c’est-à-dire des effets d’inhibition, et non pas de facilitation, pour les mots ayant une base grecque et un suffixe en -ιστής /i'stis/ ‘-iste’ (e.g.,active dans ακτιβιστής /aktivi΄stis/ 'activiste') et en -ισμός /-i΄smos/ ‘-isme’ (e.g., ακτιβισμός /aktivi΄smός/ 'activisme'). Les analyses statistiques complètes nous permettront de nous interroger avec davantage d’objectivité sur le rôle du parcours éducatif et la nature du plurilinguisme de nos participants en termes d’organisation de leur lexique mental en L2. Nous pouvons néanmoins avancer l’hypothèse que s’il y a des effets morphologiques statistiquement significatifs, cela pourrait indiquer que les participants répondent sur la base de l’activation de leurs représentations d’une part du grec, pour ce qui concerne la condition c. ; d’autre part, pour les mots construits avec 0-base grecque (e.g., ακτιβιστής /aktivi΄stis/ 'activiste' et ακτιβισμός /aktivi΄smός/ 'activisme') nos participants répondent sur base de l’activation de leurs représentations de l’anglais, du français, entre autres.
Si nous comparons nos résultats avec ceux de l'étude de Voga et Anastassiadis-Syméonidis (2017), obtenus auprès d’un public de monolingues grecs, dont le profil socio-éducatif (apprenants en CAP) diffère des profils classiquement examinés dans la littérature expérimentale, nous pouvons constater que la population minoritaire que nous étudions ici n’est pas du tout du même profil. Dans l’étude de Voga et Anastassiadis-Syméonidis (2017), aucun effet n’a été obtenu, mis à part un effet d’identité pour les mots suffixés en -ικός /i΄kos/ ‘-ique’ de base grecque. Pour les autres conditions, aucun effet d’identité ou morphologique n’a été obtenu chez les élèves (jeunes adultes) du CAP de Thessalonique. Les autrices de cette étude expliquent, entre autres choses, que ces résultats atypiques en comparaison avec ceux des monolingues experts en lecture, seraient probablement liés à la scolarité reçue et à l’exposition réduite à l’écrit du groupe des élèves du CAP. Ces deux éléments affectent le traitement des mots longs et peu fréquents (dans leur L1). Le groupe que nous avons examiné ici, issu de la communauté minoritaire de Thrace, se démarque nettement des élèves du CAP, notamment sur deux points : a) d’une part, il maîtrise des langues étrangères, ce qui lui donne la possibilité de faire correspondre les suffixés 0-base en -ιστής/-i΄stis/ ‘-iste’ à leurs entrées lexicales des langues dont ces suffixés sont issus ; d’autre part, il semble avoir une exposition au grec à l’écrit comparable à celle de la population étudiante de grandes villes (même si, sur ce point, les résultats de la condition b. doivent aussi être pris en compte et analysés).
Quoi qu’il en soit, il nous semble important de recueillir plus d’informations concernant les mécanismes cognitifs de l’accès aux mots construits morphologiquement et l’organisation du lexique mental des locuteurs (L1 et L2). En effet, les études de Silva & Clahsen (Silva & Clahsen, 2008) d’une part de Voga et al. (Voga et al., 2014) d’autre part, qui ont manipulé les mêmes facteurs dans les mêmes conditions expérimentales et avec le même type de locuteurs pour la L2 (i.e., l’anglais) révèlent des effets d’amorçage (e.g., flexionnel et dérivationnel) substantiellement différents. Cela aboutit à des conclusions et interprétations des résultats divergentes, tant sur la question de la différence qualitative entre les locuteurs natifs et non natifs que sur celle du rôle de la morphologie dans l’organisation du lexique mental. Plus précisément, et sans entrer ici dans les détails, la conclusion de Silva & Clahsen (Silva & Clahsen, 2008) selon laquelle le locuteur non-natif serait moins sensible aux relations morphologiques n’est pas du tout validée par nos résultats.
Etant donné que la conscience morphologique, définie par Carlisle (Carlisle, 2000) comme compétence à réfléchir implicitement sur la morphologie et aux habiletés à manipuler explicitement la structure interne des mots sur le plan des morphèmes, joue un rôle important pour l’apprentissage du lexique (L1 et L2) avec des bénéfices en cascade sur la compréhension de texte (e.g., Levesque, Kieffer & Deacon, 2017), les travaux de recherche qui considèrent les locuteurs sous l’angle de leur diversité nous paraissent nécessaires. Cette diversité, allant des locuteurs avec un profil socio-éducatif et sociolinguistique typique à ceux présentant des profils linguistiques peu ou pas du tout étudiés, a des retombées sociétales pour l’éducation en générale et la didactique des langues en particulier. Ces disciplines pourraient davantage se centrer sur l’enseignement de la morphologie, à la fois du point de vue de la structure interne des mots (décodage) et de celui des relations formelles et sémantiques que ces derniers entretiennent (analyse).
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Notes
[1] Avec l’utilisation du terme code-mixing nous indiquons un mélange de codes, c’est-à-dire un transfert d’éléments, des mots d’une langue à une autre ou un mélange entre elles. Il y a plusieurs linguistes qui utilisent indifféremment les termes de code-mixing et code-switching, cependant, certains font la distinction et parlent d’une hybridation de plusieurs langues. Muysken (2000) utilise le terme code-mixing pour ‘désigner tous les cas où les éléments lexicaux et les traits grammaticaux de deux langues apparaissent dans une phrase’« I am using the term code-mixing to refer to all cases where lexical items and grammatical features from two languages appear in one sentence » (p. 1).
[2] Avec le terme code-switching, on se réfère à l’alternance entre deux ou plusieurs langues ou variétés/dialectes linguistiques dans le cadre d'une même conversation en utilisant de manière cohérente les éléments comme la syntaxe, la morphologie et la phonologie de chacune d’elles et ce passage d’une langue à l’autre lors d'une conversation. Selon Poplack (2004), cela concerne une manifestation linguistique du contact et du mélange langagiers qui comprend entre autres divers emprunts au lexique et à la syntaxe, transfert linguistique, convergence linguistique, ingérence, attrition linguistique, langue morte, pidgin, créole. Cela fait référence aux éléments linguistiques de deux ou plusieurs langues sans changement nécessaire d’interlocuteur ou de sujet. Pour Gardner-Chloros (1983) cela se produit quand la population emploie plusieurs langues dont chacune a ses propres structures avec ses variétés régionales ou sociales, ou dialectes.
[3] « ΠΕΜ » en français PEM (Programme d'Éducation pour les enfants Musulmans) est le programme qui dépend du Ministre de l’Education, financé par des fonds de l’Union Européenne, qui a commencé en 1997, dont la 1ère campagne a duré 10 ans, et dont lebut était l’amélioration du système éducatif des groupes de citoyens à risque d'exclusion sociale comme la minorité de Thrace.
[4] L’utilisation de ce terme selon Askouni (2008) exprime l’abandon du parcours scolaire. Même s’il n’est pas strictement lié à l’éducation obligatoire, il y fait fortement référence de par l’organisation et la qualité de l’éducation. Ce terme porte une connotation négative et est lié aux conséquences socio-économiques.
[5] Dans le ‘paradigme d’amorçage masqué’ que nous allons employer ici, cf. § procédure.
[6] Mot comme amorce lorsque la cible est un mot et pseudo mot ou non mot comme amorce pour ce même type de cible.
[7] Lexique 3.83, comprend 142 694 entrées de mots (New, 2021), c’est un outil qui permet de faire des recherches sur une base de données lexicales pour la langue française (freqlemlivres : la fréquence du lemme (par million d’occurrences) selon le corpus de livres) (New, 2001).